Comment Sharpstone redéfinit l’investissement early stage par la création de relations durables avec les entrepreneurs

15/07/2025

7 minutes

Dans un écosystème où les fonds de capital-risque se multiplient, Sharpstone se distingue par une approche unique : accompagner les startups dès leur démarrage, avant qu’elles n’arrivent sur le radar des investisseurs. Mais ce n’est pas tout. Sharpstone tisse des liens profonds avec les fondateurs, qu’il continue de soutenir bien au-delà des premiers tours de table. Retour sur la vision, la méthode et les ambitions de ce fonds atypique.

Germain GASCHET

Founding Partner Sharpstone Advisory & CEO chez Sharpstone Capital

Qu’est-ce qui vous a motivé à créer Sharpstone Capital ?

Germain : L’aventure a commencé en 2014 avec la création de Sharpstone Advisory. À l’époque, avec mon associé Alain Chabanne,nous voulions apporter une réponse à un vrai manque sur le marché : le financement de l’innovation était morcelé, cloisonné, chaque dispositif était appréhendé en silo et les entrepreneurs confrontés à de nombreux interlocuteurs différents.

Notre ambition était de devenir un partenaire global des entrepreneurs, capable de les accompagner sur l’ensemble des leviers de financement disponibles, du tout début de l’aventure jusqu’à une potentielle IPO.

L’objectif était clair : proposer une lecture nouvelle de l’amorçage. Nous voulions innover dans la manière de sourcer les startups, dans la façon de les évaluer, et surtout, dans l’accompagnement post-investissement. Nous ne voulions pas juste être un chèque.

Nous voulions être cet interlocuteur unique, qui simplifie le parcours de financement. En partant des roadmaps technologiques et business de l’entreprise, nous tracions sa roadmap financière. Nous avons rapidement compris que pour aller plus loin et apporter encore plus de valeur, il fallait aussi que nous investissions directement dans ces projets. Mais avant ça, il fallait construire notre crédibilité, prouver notre capacité à générer un deal flow pertinent et à comprendre les besoins des startups. C’est ce chemin qui nous a menés, en 2019, à lancer Sharpstone Capital.

Qu’est-ce qui vous différencie concrètement des autres fonds early-stage en France et en Europe ?

Germain : Ce qui nous distingue, c’est l’écosystème que nous avons construit autour de Sharpstone Advisory et d’un certains nombre de partenariat stratégique comme Entrepreneur First, 21st ou le CNRS par exemple. Ainsi, nous sommes au contact des projets extrêmement tôt, parfois même avant leur création officielle. Ce qui nous permet de détecter des pépites que d’autres ne voient pas.

La plupart des fonds reçoivent des centaines, voire des milliers de dossiers par an, mais ils n’ont pas le temps de s’y plonger en profondeur. Ils sélectionnent forcément de manière très filtrée. Nous, nous avons cette capacité à accompagner des projets en amont, à comprendre leur technologie dans le détail, à vulgariser leur solution pour obtenir des financements publics ou fiscaux, à analyser des marchés parfois encore en gestation. Et surtout, nous travaillons avec les équipes sur des problématiques très opérationnelles, bien avant d’envisager d’investir.

C’est là que se construit notre conviction. Nous ne nous basons pas uniquement sur un pitch deck ou une première traction. Nous avons vu les fondateurs travailler, nous savons comment ils réagissent aux difficultés, nous connaissons leur capacité d’exécution. Nous investissons dans des personnes avec lesquelles nous avons déjà une relation forte.
Je pense que cela nous permet aussi de surmonter certains biais, par exemple nous avons le double de startup avec une cofondatrice que la moyenne des fonds.

Quelle est la thèse d’investissement de Sharpstone Capital ? Quels types de startups vous attirent particulièrement ?

Germain : Nous sommes très attachés aux projets technologiques. Cela peut être de la deep tech issue de la recherche académique, comme du CNRS ou de l’INRIA, mais aussi des startups portées par des entrepreneurs aguerris qui montent leur deuxième ou troisième projet et qui veulent aller vite.

Nous avons une préférence marquée pour les modèles B2B. Nous aimons quand la proposition de valeur est claire, mesurable et que nous pouvons comprendre rapidement l’efficacité commerciale.

Mais la technologie et le marché ne font pas tout. Ce qui fait la différence, c’est l’équipe. Nous cherchons des fondateurs capables de déplacer des montagnes. Nous aimons ceux qui, face aux imprévus, savent se réinventer, trouver des solutions hors cadre, avancer malgré les obstacles. Nous cherchons des profils qui n’abandonnent pas et qui comprennent que l’investissement, ce n’est pas juste une levée de fonds, c’est un vrai partenariat dans la durée.

Quelles startups incarnent le mieux votre vision de l’investissement ?

Germain : Bitstack est une belle illustration. Nous les avons rencontrés très tôt, avant même leur sélection chez Y Combinator. Leur approche de l’épargne en bitcoin était innovante, et surtout, l’équipe avait une capacité d’exécution impressionnante.

Il y a aussi Spore.Bio, une startup deep tech que nous avons repérée dans le cadre du programme Entrepreneur First. Nous avons tout de suite accroché avec l’équipe. Nous les avons accompagnés dès leurs premières démarches, notamment sur le financement non dilutif, et nous avons investi très rapidement.

Une histoire qui nous tient particulièrement à cœur, c’est celle de Manty. C’est notre tout premier investissement. Ce qui est fort, c’est que l’entrepreneur, Mathieu Noé, a ensuite monté une nouvelle boîte, BaCta, dans laquelle nous avons réinvesti. Mieux encore : il est lui-même devenu investisseur dans notre deuxième fonds. C’est typiquement ce qu’on cherche à construire : une relation long terme, où l’entrepreneur devient à son tour partie prenante de notre aventure.

Comment accompagnez-vous concrètement ces startups ?

Germain : Notre cœur de métier, c’est d’optimiser leur stratégie de financement. Prenons l’exemple de Spore.Bio : nous les avons accompagnés sur de plusieurs dispositifs en faveur des deeptech. Leur accès est très sélectif, il faut démontrer une forte promesse technologique et pouvoir aligner les étapes de leur R&D avec ces dispositifs pour pouvoir les enchaîner. Il est essentiel de bien comprendre la tech pour être capable d’aller chercher les financements les plus pertinents.

Ensuite, nous les aidons à aller chercher des financements publics, des subventions, des concours très compétitifs. L’objectif est de maximiser les ressources disponibles, d’allonger le runway, et surtout, de limiter la dilution. Le financement VC coûte cher, donc chaque euro non dilutif que nous pouvons aller chercher est stratégique.

Ce que nous construisons, ce n’est pas uniquement une levée de fonds. C’est un plan global de financement, un chemin viable qui donne aux fondateurs plus de temps et de moyens pour atteindre leurs objectifs sans céder trop de capital trop tôt.

Sharpstone Capital a récemment été classé le TOP 30 des VC français pre-seed par Versible. Comment expliquez-vous cette dynamique ?

Germain : Ce classement est une belle surprise, obtenue sans démarche de notre part, ce qui le rend d’autant plus significatif. Je pense que nous y figurons pour plusieurs raisons.

Depuis le lancement de Sharpstone Capital en 2019, nous avons réalisé une quarantaine d’investissements. Nous prenons des risques sur des projets complexes, notamment en deep tech, qui représente près de 40 % de notre portefeuille.
Nous intervenons très tôt sur les dossiers, nous savons décider rapidement et, surtout, lors de nos tours suivants, nous sommes rejoints par des fonds plus matures. C’est une vraie validation de nos choix.

Au-delà des chiffres, je pense que la qualité des relations que nous construisons avec les entrepreneurs fait aussi la différence. Ils savent que nous sommes impliqués, que nous comprenons leurs enjeux, et cela se reflète dans la manière dont ils parlent de nous. Cette réputation, nous la devons à notre sérieux et à notre capacité à accompagner des personnes brillantes sur des projets ambitieux.

Comment travaillez-vous avec vos LPs ? Quel type d’investisseurs vous accompagne ?

Germain : Nos investisseurs sont essentiellement des entrepreneurs. Ce ne sont ni des institutionnels, ni des banques. Sur notre premier fonds, ils étaient sept : des personnes qui nous ont fait confiance malgré notre absence de track record à l’époque. Sur le deuxième fonds, ils sont treize, issus d’un cercle élargi grâce aux performances du premier véhicule.

Nous partageons systématiquement toutes nos décisions d’investissement avec eux, et certains choisissent de co-investir à nos côtés. Ce qui est particulièrement intéressant, c’est que beaucoup ne viennent pas du monde des startups. Nous comptons parmi eux des dirigeants de PME, des entrepreneurs plus “traditionnels” qui découvrent l’écosystème tech en s’investissant avec nous. Nous commençons également à fédérer une communauté de business angels autour de Sharpstone. L’early stage reste un terrain où la collaboration est essentielle : il y a de la place pour tout le monde et nous aimons partager nos opportunités avec d’autres investisseurs.

Travailler un jour avec des institutionnels n’est pas exclu, mais aujourd’hui, nous n’avons pas encore la structure adaptée. Cela demanderait une autre organisation, probablement via une société de gestion. Ce sera notre prochaine étape. Ce qui nous anime avant tout, c’est de continuer à aller très tôt sur les dossiers et d’élargir notre capacité d’investissement. Nous aimerions pouvoir accompagner encore plus de projets, faire des tickets plus importants et pouvoir revenir sur des tours suivants, notamment quand nous découvrons des pépites que nous n’avons pas pu saisir à l’amorçage.

Utilisez-vous des technologies ou des méthodes innovantes dans vos processus d’investissement ?

Germain : Sur la partie investissement, nous restons très attachés à l’humain. Ce qui forge notre conviction, c’est le temps que nous passons avec les équipes. Nous ne croyons pas aux algorithmes capables de sélectionner les meilleures startups à notre place.

En revanche, sur la partie sourcing, nous commençons à utiliser des outils plus avancés. Nous faisons du scrapping, nous exploitons des bases de données comme CF News et Dealroom et nous intégrons progressivement des briques d’intelligence artificielle notamment grâce à Dust et Outmind pour automatiser la recherche et améliorer notre détection en amont.

C’est un véritable équilibre entre technologie et intuition. Les outils nous permettent de gagner en efficacité pour identifier les pépites le plus tôt possible, mais ils ne remplaceront pas la richesse du contact humain.

Quelles sont les prochaines étapes pour Sharpstone Capital ?

Germain : Nous souhaitons continuer à accompagner les meilleurs projets et renforcer notre position comme référence dans le financement de l’innovation, que ce soit via le conseil ou l’investissement.

Chaque année, nous élargissons le profil des startups que nous accompagnons, et nous voulons poursuivre cette dynamique. Nous savons que certains considèrent la période actuelle comme difficile pour lever des fonds, mais de notre côté, nous restons très optimistes. Les meilleurs projets trouvent toujours des financements.

Aujourd’hui, une opportunité se présente : la concurrence est moins forte sur les sujets pointus. Les meilleures startups peuvent donc accélérer encore davantage, car elles font face à moins de copycats sur leur marché. Nous serons présents pour les accompagner à chaque étape.

Sharpstone Capital incarne une autre manière de faire du venture capital. Loin de la course aux dossiers et des logiques purement financières, le fonds s’attache à créer des relations solides et durables avec les fondateurs qu’ils accompagnent. Grâce à la complémentarité entre le conseil et l’investissement, Sharpstone parvient à détecter des projets à fort potentiel dès leurs premiers pas et à maximiser leurs chances de succès en leur apportant des ressources non dilutives stratégiques.
Dans un contexte où les investisseurs sont plus sélectifs et où le financement se fait parfois plus rare, Sharpstone Capital rappelle une chose essentielle : les meilleurs projets trouvent toujours des partenaires engagés, capables de les suivre au-delà du simple ticket d’amorçage. C’est cette vision humaine, pragmatique et audacieuse qui continue de faire la différence.